
Les Amis de Nicolas Baudin ont eu une heureuse initiative samedi dernier en l'honneur du 220 ème anniversaire de la mort du Capitaine à l'île Maurice en nous proposant une visite à la
Bibliothèque centrale du Museum d'Histoire Naturelle pour la sortie de quelques manuscrits.
Si l'expédition aux Terres Australes (1800-1803) est
"relativement" connue, le voyage de Baudin aux Antilles sur
La Belle-Angélique demeure ignoré, et le seul exemplaire du récit est conservé dans cette bibliothèque.
Celui-ci est
maintenant numérisé mais on ne peut être que stupéfait lorsqu'on se trouve face à ses aquarelles de 1798 d'une fraicheur incroyable !
Ce premier voyage sera un succès et célébré comme tel lors du retour de Baudin en pleines Fêtes de la Liberté et de l'Entrée triomphale des objets de sciences et d’arts recueillis en Italie et ce, le 27 juillet 1798.
Cependant, l'expédition avait mal débuté, puisqu'après avoir essuyé une forte tempête dans le Golfe de Gascogne, il fallut abandonner cette
Belle-Angélique pour un nouveau navire
Betsy (
toujours appelée La Belle-Angélique dans le coeur des marins).
Les naturalistes en profitèrent pour explorer l’île et le peintre de bord, Antonio Gonzales, dont on a perdu la trace, en profita pour réaliser les superbes aquarelles qui peuplent le récit de voyage.
Malheureusement, l'arrivée à la Trinité se passe mal. L'île est aux mains des Anglais et les caisses de plantes collectées sont saccagées. Baudin parvient à fuir à Saint-Thomas et hiverne à Porto-Rico, une île méconnue des naturalistes du bord. De nombreuses péripéties attendent encore les membres de l'expédition mais ils ont "fait le plein" de collectes.
Anselme Riedlé, le jardinier du bord deviendra le grand ami de Nicolas Baudin et l'accompagnera vers la Nouvelle-Hollande. De la grande expédition vers les terres australes, émouvantes sont encore les pages noircies par Riedlé s'intéressant aux plantes mais aussi aux hommes, à la langue des cultures rencontrées...ou encore des lettres de Baudin à Jussieu, alors Administrateur du Muséum Nationale de Paris, telle la suivante envoyée de Kupang (Timor), le 13 vendémiaire an 10 (5 octobre 1801) et parfaitement lisible :
"
J'ai bien du regret de ce que ma santé ne me permet pas dans ce moment-ci de vous donner des détails circonstanciés de tout ce que nous avons recueilli en objets de curiosité et d'histoire naturelle. Tourmenté par une fièvre intermittente dont les intervalles me laissent à peine le temps de me reconnaître, je ne puis que vous annoncer que les Collections des Citoyens Maugé et Riedlé sont déjà très nombreuses et précieuses. Le premier a plus de Deux Cents Oiseaux qu'il croit absolument nouveaux, grand nombre de Coquilles, Insectes ...et le second plus de Cinq ou Six Cents plantes qui sont plus de cent cinquante Espèces dont il n'a aucune connaissance..."
Riedlé est déjà très malade et mourra 15 jours plus tard.

Et si vous passez par là, n'oubliez pas, au rez-de-chaussée, de jeter un coup d'oeil au
Cabinet de Joseph Bonnier de la Mosson, riche héritier qui aménagea en 1726 le premier étage de son hôtel particulier en galerie de neuf cabinets présentant des artefacts rares et des naturalia. À sa mort, en 1744, sa veuve
vendit à Buffon cinq armoires du deuxième cabinet (celui des "animaux desséchés") et c'est ce que nous voyons de nos jours, après avoir été restaurées et installées définitivement en 1979.
Photos de l'autrice, Bibliothèque du MNHN de Paris, 16 septembre 2023.