Au Musée Jacquemart-André jusqu'au 26 août 2007.
Sur le thème des masques de Nuo qui étaient à l'origine des masques d'exorcisme chamanique, se déroule une mise en scène volontairement sombre et mystérieuse.
À l'image de ces rouleaux chinois où le spectateur pénètre pour s'enfoncer doucement dans un monde de cascades, de monts et de brumes; il découvre ici des masques, lesquels, une fois «leurs yeux ouverts» sont des dieux ou des démons.
La première photo représente Kailu, le dieu qui ouvre les chemins : les routes des quatre points cardinaux «plus celle du centre», nous précise la notice, «la porte de tous les possibles»...
Un monde certes complexe s'ouvre à nous mais je me surprends à penser aux masques d'Afrique qui me sont familiers, et je crois reconnaître dans ce masque bouffon, un masque Mbangu des Pende...
Plus loin, je lis que ce masque de bonze avec ces drôles de lunettes est celui qui, à la fin d'une cérémonie, vient nettoyer l'aire sur laquelle s'est déroulé le rite afin de chasser tout esprit qui continuerait à rester dans le monde des humains.
J'ai déjà vu cela lors de documentaires sur des cérémonies en Nouvelle-Guinée...
De manière plus contemporaine et plus «profane», cela me fait songer au texte de Georges Banu, «L'acteur qui ne revient pas».
Le lieu de la «re-présentation» fut le lieu unique de vérité et l'acteur du théâtre japonais (puisque c'est de cela dont il s'agit dans ce livre) ne peut le quitter que pour disparaître...
Les oeuvres chinoises sont toutes superbes et uniques.
Mais malgré cet univers totalement inconnu qui m'aspire dans ces salles feutrées, je perçois dans les masques de Nuo une universalité de leurs raisons d'«être». Ils sont là pour que nous puissions entrer en contact avec les ancêtres, les esprits, afin de neutraliser les malveillants, puiser la force des bienveillants, maintenir une cohésion sociale; invoquer encore et toujours les dieux pour la fertilité de la terre, la fécondité des femmes, le succès dans une vie à venir.
(Je connais toutefois quelques exemples qui viendront me contredire...)
n.b : Le Musée Jacquemart-André avait accueilli, il y a deux ans, la très belle exposition L'Homme et ses masques (Collection Barbier-Mueller) dont on peut encore visionner un diaporama.
Photo 1 : Collection Marc Petit.
Photo 2 : Monts Jingting en automne / Shitao (Daoji, 1642-1717), Musée Guimet.
Photo 3 : Collection privée.
Photo 4 : Collection Galerie Punchinello.
Photo 5 : Collection Jean-Marcel Gayraud.
Crédits photographiques 1, 3, 4 et 5 : © Luc Berthier
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