Dans le précédent billet, j'affirmais que les arts océaniens se révélaient être une inépuisable source d'étonnements.
Je me souviens qu'une sculpture de ce type fut l'objet de la première question posée, il y a quelques années de cela, en préambule au premier cours d'histoire des arts d'Océanie que je suivais alors.
De quoi s'agissait-il ?
Je pense que nous fûmes plusieurs à répondre en choeur qu'il s'agissait là d'un siège. Un tabouret «cérémoniel» osions-nous le qualifier ainsi, tant la sculpture était belle et que seul le « sacré » aurait pu justifier l'importance du travail.
À partir de ce qui allait s'avérer être une complète méprise et d'autres exemples judicieusement choisis, nous comprîmes très vite que les arts d'Océanie allaient se jouer de nos intuitions et de nos préjugés !
Ces deux objets ont été réalisés en région Iatmul, dans le Moyen-Sepik, et sont en fait des pupitres d'orateur ou teget. La figure du pupitre indique la présence de l'ancêtre du clan dominant de la Maison des Hommes du village.
Les joutes oratoires étaient fréquentes et importantes puisqu'elles permettaient à certains hommes d'augmenter leur prestige. Un crédit qui s'avérait d'autant plus important dans ces sociétés à Big Men, hommes d'influence dont le pouvoir s'acquérait sur une méritocratie, sur leur capacité à accroître sans cesse les richesses échangées.
Lors de ces débats, les orateurs étaient debout près du pupitre et frappaient celui-ci avec un bouquet de feuilles, accompagnant ainsi du geste, les points importants de leur discours.
La première pièce présentée ici fut l'objet d'une acquisition récente du Musée du Quai Branly, en 2006.
On pourra donc lire une notice plus détaillée sur le site du Musée.
Photo 1 : Musée du Quai Branly.
Photo 2 : in Meyer, A. J. P. 1995. Art Océanien.
Photo 3 : photo © Patrick Gries
Bjr Lyliana.
Ton blog est une inépuisable source d'émerveillements. J'y reviens toujours, comme vers une "matrice originelle". Des objets similaires peuplaient mon enfance, quoique de facture différente et voués à un autre usage. Ils s'y trouvaient en grand nombre dans le bureau de mon paternel, "orateur du sacré", guérisseur à ses heures et, bien sûr, amateur d'art Kongo.
Tu comprends maintenant pourquoi je reviens ici.
Bonne journée!
Rédigé par : Bona | 06 mai 2009 à 13:29
Merci Bona. Je suis étonnée que tu parviennes à trouver des résonances entre ces oeuvres et celle de la communauté Kongo à laquelle tu appartiens. Je suis bien lucide que dans nos livres, dans nos musées, on nous façonne d'une certaine façon le regard en nous montrant certains objets et pas d'autres parce qu'ils "plaisaient" moins aux occidentaux et ont donc été peu renseignés ou peu collectés.
Rédigé par : Lyliana | 06 mai 2009 à 20:13