On ne sait que peu de choses sur l'art Kuyu, art d'un peuple situé autour de Owando, dans la cuvette formée par la Likouala, les rivières Kouyou et Alima dans le nord du Gabon.
Ce que nous connaissons dans les collections consiste essentiellement en des marottes polychromes Kyebe Kyebe (Kebe Kebe) exhibées jadis pour les initiés lors de danses.
Ces performances conduisaient les danseurs, entièrement cachés sous un vaste costume, à actionner ces têtes grâce à des bâtons permettant alors de les faire grimper jusqu'à 20 mètres du sol.
De nos jours, les danses existent toujours dans un but de divertissement mais poursuivent la tradition d'une performance incroyable lors de laquelle les danseurs tournoient à vive allure puis s'affaissent en formant un cône.
La vidéo suivante donne une idée de la danse (filmée semble-t-il à Owando) mais ne montre pas malheureusement les marottes.
À côté des marottes, existent des statues dont certaines d'entre elles ont des têtes amovibles.
Que ce soit les têtes ou les statues (plus rares), ce qui nous frappe au premier regard, c'est la richesse et l'abondance des motifs reproduisant des scarifications.
Anne-Marie Benezech, dans sa thèse de 1989, L'Art des Kouyou-Mbochi de la République populaire du Congo: Tradition artistique et histoire : étude de cas en Afrique équatoriale, a remarquablement étudié styles et motifs.
Les visages arborent d'importantes scarifications sur le front, rappelant, dans le cas de cette figure masculine, les motifs de cauris.
Les tempes sont toujours scarifiées, la bouche généralement entre-ouverte, laissant apparaître des dents élimées. La coiffure, sophistiquée ici par la présence des cornes, est souvent le support d'une représentation animale.
Le torse est décoré d'un plastron dont les motifs reprennent ceux du front et se retrouvent sur le petit pagne. L'ombilic est saillant et bien mis en valeur par la présence de nombreuses scarifications, lesquelles, dans le cas de l'exemplaire du Metropolitan Museum, couvrent toute la partie ventrale de ce tronc démesurément étiré.
Les bras, allongés mais d'une grande finesse, sont repliés et ne montrent qu'une petite main à quatre doigts !
Les jambes portent des chevillières, mais il est clair que le bas du corps a été réalisé avec une moindre attention.
L'interprétation de tous ces signes est très complexe.
Anne-Marie Benezech en fait une étude poussée montrant, entre autres, que certaines scarifications ont des significations différentes selon leur emplacement et leur rapprochement avec d'autres. Par exemple, le motif de bouchon (cercles concentriques) peut avoir valeur de protection, mais aussi d'identification sociale, placé sur les tempes ; il peut aussi être signe de l'autorité du chef (sur les coudes)...
Tant bien même la signification nous échappe-t-elle, nous sommes en présence d'oeuvres étonnantes et éclatantes par leur polychromie.
Photo 1 : Musée du Quai Branly.
Photo 2 : Musée Ethnographique d'Anvers.
Photos 3, 4, 5 et 6 : The Metropolitan Museum
Bonsoir
Avez déja vu des marottes Kouyou présentant l'ancien style mais fabriquées complètement en argile?
Si oui,vers quelle période auraient elles été fabriquées?
Avez vous de l'information concernant ces objets?
Merci
Rédigé par : Claudette HOUDE | 23 novembre 2013 à 20:10
Bonjour,
Je ne connais pas ce genre de marotte. J'espère que d'autres lecteurs pourront vous répondre.
Cordialement
Martine B.-P.
Rédigé par : Detours des Mondes | 30 novembre 2013 à 11:43
Bonjour et merci pour votre site toujours intéressant et documenté.
Je m'interroge sur la provenance de quelques masques qui m'ont été vendus sous l'appellation 'ABAKOUYA', dont le style se rapproche des masques blancs du centre du Gabon (Tsogho - Pove - Vuvi ..c'est à dire ni Punu ni Fang ..) du type So'o / Mbundi ... Les KUYU produisent-ils des masques, en plus de leurs marottes ? "Bakukuya" designe-t-il autre chose qu'un plateau où vivent les KUYU ? L'appellation 'Abakouya' serait-elle fantaisiste et servirait-elle de fourre-tout à un atelier de production de masse de la banlieue de Librevile ou de Douala ? Le revendeur en question, camerounais, avait plutôt de bonnes pièces de l'aire Nigeria-Cameroun-Gabon ...
Merci d'avance de toute information, et de continuer à nous informer sur l'actualité des Arts Premiers !
Rédigé par : J.D. Fievet | 22 octobre 2017 à 16:43
Bonjour ,
Je vous remercie pour cette page sur les Kuyu.
Quelle complexité et quelle masse d'informations représente les arts d'Afrique etc...Je m'y intérèsse depuis près de 40 ans et me rends chaque jour compte que je n'aurai pas assez d'une vie pour en faire le tour. C'est aussi là que réside tout l'intérêt ! Jamais d'ennui sauf quand je parle avec certains qui gonflés d'orgeuil et d'autosatisfaction se font les chantres d'un monde culturel qu'ils pensent appartenir à un monde révolu.
Les arts liés aux cultes ne sont pas morts et ne sont pas seulement l'apanage de manifestations touristiques.Il suffit de sortir des sentiers battus pour le constater.
Pierre F.
Rédigé par : Pierre F. | 11 mai 2018 à 11:28
Bonjour
Très flatter par votre texte, veuillez noter que le Kyebe-kyebe, kevhe-kievhe, kébé-kébé, selon la graphie de différents auteurs n'intéressent pas que les peuples Kuyu et Mbochi du nord- congo. Le kiebe-kiebe est pratiqué par les peuples des pays interfluve Alima-Kouyou, notamment les Koyo ou Kuyu, les Mbochis, les Tege ou Téké-Alima et les Likuba des lagunes continentales de Mossaka.
Le livre, en chantier chez l'Harmattan Paris, intitulé "Et si le kiebe- kiebe vous était conté?" de Daniel Isaac Itoua va ajouter au fonds commun des connaissances et la compréhension mutuelle entre ceux qui le liront et les adeptes de cette cosmogonies du Congo.
Rédigé par : Itoua | 13 juin 2018 à 19:45
Bonjour je cherche à tout prix à contacter les organisateurs des danses Kebe Kebe à Oyo. Merci de me donner un contact.
Rédigé par : Fram | 17 novembre 2018 à 10:19
Je n'ai pas de contact mais peut -être certains pourront vous répondre via ce blog.
Cordialement
Rédigé par : Martine Pinard | 18 novembre 2018 à 09:48
Bonjour,
Avez-vous déjà rencontré ce type de marotte Kuyu (60–70 cm de long) dont l’extrémité inférieure était lestée à la façon d’un pilon de mortier (autre fonction ?).
Merci pour ce site et les échanges très intéressants.
Cordialement.
A.C
Rédigé par : A.C | 08 août 2022 à 10:30
Bonjour,
Ce petit article a déjà 12 ans. Je n'en sais pas plus mais il est paru en 2021 un livre bien complet : Kuyu d'Anne-Marie Bénézech
https://www.fivecontinentseditions.com/fr/p/kuyu-2/
qui vous donnera beaucoup d'informations.
Cordialement
Rédigé par : Martine B.-Pinard | 08 août 2022 à 15:44