... liseur d’entrailles et de destins violets
récitant de macumbas
mon frère
que cherches-tu à travers ces forêts
de cornes de sabots d’ailes de chevaux
toutes choses aiguës
toutes choses bisaiguës
mais avatars d’un dieu animé au saccage
envol de monstres
j’ai reconnu aux combats de justice
le rare rire de tes armes enchantées
le vertige de ton sang
et la loi de ton nomin Moi, laminaire, 1982, Aimé Césaire
Wilfredo Lam, c'est d'abord La jungle ! Cette explosion de couleurs, ce débordement de formes, cette "sauvagerie" : Perdue dans la contemplation de la toile, je me souvenais alors des paroles de Marlow "...c’était comme voyager en arrière vers les premiers commencements du monde, quand la végétation couvrait follement la terre et que les grands arbres étaient rois. […] C’était l’immobilité d’une force implacable appesantie sur une intention inscrutable »
Mais au-delà de ces visages-masques, ce sont aussi ces invités d'un autre monde, êtres hybrides, humains transformés sous l'emprise d'une possession, le tout baignant dans la couleur ocre de la terre.
Ceux-là, on a envie de les prendre moins au sérieux ! Et pourtant... ils m'évoquent les mimi tels ceux peints sur écorce par Yirawala, un abrorigène australien (ci-dessous). Ces personnages à l'aspect jubilatoire sont en fait de puissants et redoutables génies.
Que dire de ces "enfants sans âmes " de Wifredo Lam ? Inquiétante étrangeté...
Tout compte fait les êtres fantastiques qui peuplent les toiles de Wifredo Lam m'impressionnent ! Notre esprit peine à intégrer les créatures composites et celles-ci nous effraient car elles troublent les frontières nettes que nous nous sommes établis entre humain et non-humain.
Le titre du tableau ci-dessous "Corps et âme" dénote de ce malaise et nous nous demandons si ces êtres là n'ont pas déjà perdu et leur corps et leur âme !
Plongez sans modération dans cette "barbarie" surréaliste où "dans la nature tropicale tout se meut sous une quiétude apparente et, seule, la nuit révèle la fête occulte, la danse qui semble être la vie intime de toutes les créatures. Le monde du tropique n’est pas plastique, il est musical, orphique". (María Zambrano)
Au Centre Pompidou jusqu'au 15 février 2016.
Photos de l'auteure - Centre Pompidou, octobre 2015
et les Mimi au museu de cultures del Mon, Barcelone, octobre 2015.
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