L'association Détours des Mondes propose le jeudi 21 mars une conférence réalisée par Jean Simonnet, collectionneur, dont le titre sera "Propos sur les îles Marquises et leurs pagaies".
On se souvient probablement de la belle exposition L'éclat des ombres présentée au musée du Quai Branly fin 2014 ou, plus éloignée encore, celle du Musée Dapper intitulée L'art d'être un homme qui s'est tenue entre octobre 2009 et juillet 2010.
Elles ont eu en commun de nous faire découvrir cette sculpture en provenance de l'île de Santa Ana (Owa Raha) dans l'archipel des Salomon. Cet objet était encore bien connu de très anciens Parisiens puisqu'il avait été présenté par Charles Ratton lors de L'exposition surréaliste d'objets de 1936, une photo attestant de sa présence dans le jardin de la galerie :
Il s'agit d'un poteau de hangar à pirogues de Santa Ana. Celui-ci, ainsi que le très célèbre figurant un couple exposé au Pavillon des Sessions, a très probablement été acheté sur place par Hugo Adolf Bernatzik durant son séjour de 1932 chez Heinrich Küper. Les deux poteaux furent du reste raccourcis à Paris par Ratton.
Heinrich Küper était un ancien militaire déserteur allemand qui vécut entre 1910 et 1950 à Gupuna sur Santa Ana. Il faut lire l'excellent article de Sandra Revolon : Heinrich Küper : le Blanc dont on parle à mi-voix, pour se faire une idée sur ce personnage qui a réussi à prendre un terrible ascendant sur les populations locales ! La photographie ci-dessus, prise par Eugen Paravicini, ethnologue devenu conservateur au musée de Bâle, entre 1927 et 1928, atteste de la présence du poteau dans le jardin de Küper.
Quant à l'emplacement initial du poteau, on en sait encore plus grâce à une photographie de Martin Johnson (ci-dessus) qui a accompagné Jack London dans son périple dans les mers du sud et qui date de 1908.
On pourrait encore en dire davantage sur cet extraordinaire objet, probable représentation d'un Ataro, être divin maître des éléments marins. Il faudrait pour cela analyser ses riches parures et sa place dans une maison cérémonielle, lieu tabou par excellence où se mêlaient la conservation des pirogues pour la pêche à la bonite et celle des reliquaires aux crânes de défunts, mais aussi hangar sacré pour les initiations des jeunes garçons.
Tout cela nous a été raconté avec passion par Isabelle Tassignon, conservatrice des collections d'archéologie et d'ethnologie à la Fondation Gandur pour l'Art, qui est intervenue jeudi dernier à la Galerie Meyer Oceanic & Eskimo Art.
On retrouvera dans l'article d'Isabelle Tassignon : Le géant des terribles Salomon de nombreuses précisions sur le poteau et on découvrira à l'occasion les autres oeuvres de cette collection genevoise.
La conférence est maintenant en ligne sur le site de la Galerie Meyer :
Suite à la vente de la célèbre collection Barbier-Mueller en arts d'Afrique et d'Océanie chez Christie's, où de nombreux records de prix d'adjudication ont été battus, ceux qui sont intéressés par la connaissance du marché de l'art et des maisons de vente aux enchères, pourront lire l'intéressant Rapport Artkhade 2024 réalisé par Aurélien Cuenot.
À l'exception de cinq lots préemptés par le musée du Quai Branly (cf. ci-dessous), adieu à la majorité des pièces qui vont rejoindre des collections privées. C'est une page qui se tourne et je pense spécialement aux nombreux voyages que nous avons faits à Genève avec l'association Détours des Mondes pour visiter ce petit musée riche d'expositions qui nous ont permis de découvrir les oeuvres classiques de différentes cultures du monde.
Et je veux confier encore, par exemple à ce collectionneur qui vient d'acquérir ce masque Mahongwe pour la somme de 3 400 000 € sans les frais, combien il m'a fait rêver lorsque j'ai acquis en 1999 l'un de mes premiers livres sur les masques africains et dont il faisait la couverture (suite à l'exposition L'autre Visage à la Fondation Mona Bismarck à Paris) ! Mais ainsi qu'on le dit : "Les rêves, ça n'a pas de prix !"
L'association Détours des Mondes propose le jeudi 7 mars une conférence de Monique Jeudy Ballini, ethnologue, intitulée Arts et appropriations culturelles.
"Dans les médias et notamment à travers les réseaux sociaux, les accusations d'appropriation culturelle revêtent aujourd'hui une dimension virale. Des polémiques ne cessent en effet de se développer à propos de la manière illégitime dont des individus ou des groupes s’emparent des éléments d’une culture qui n’est pas la leur. Parce qu'elles opposent le plus souvent des communautés minoritaires à des groupes dominants, ces façons d'agir sont dénoncées comme des formes de néo-colonialisme. On en examinera les répercussions dans divers registres du domaine artistique en interrogeant la validité anthropologique de la notion d'« appropriation culturelle »." M. J.-B.
Comme tous les ans, le musée du Quai-Branly Jacques Chirac nous a concocté un week-end rempli de conférences, débats et spectacles. Et c'est le corps qui est au cœur de cette 6ème édition, les 2 et 3 mars 2024.