Nias ; une petite île au large de Sumatra. Pas très vendeuse de nos jours en termes touristiques : des spots de surf, deux villages traditionnels pour touristes, peu d'infrastructures hôtelières... et il pleut tout le temps !
Oui mais... une importante littérature lui est consacrée et il est temps de préparer la documentation de mon prochain voyage.
Certes, elle s'est tarie à la fin des années 1990 ; puis le tsunami de 2004 et le tremblement de terre de 2005 ont mis à mal cette île et ses habitants. On n'a moins parlé de cultures et de traditions et plus de reconstruction, nécessaire, vitale.
Le passé de cette île assez bien placée sur la route du commerce maritime mais dépourvue d'épices fut riche et tragique. Au IXème siècle, un marchand persan aurait remarqué que les nobles de Nias portaient de nombreux bijoux en or et que leurs guerriers pratiquaient la chasse aux têtes.
D'abord victimes de la traite des esclaves par les marchands d'Aceh, les chefs de l'île comprirent vite les bénéfices à retirer de ce commerce.
Plus près de nous, les premières descriptions de Nias nous proviennent de Sophie Raffles, la seconde épouse de Sir Thomas Raffles, fondateur de Singapour, gouverneur de Java (1811-1816) puis de Sumatra (1817-1818), qui les rapporte dans les
mémoires de son mari au tout début du 19ème siècle.
En 1863, paraît l'ouvrage
Het Eiland Nias par J.T. Nieuwenhuisen et H.C.B. Von Rosenberg, un rapport en néérlandais concernant l'île de Nias et ses habitants dont je n'ai pu trouver la teneur. Il semble que le
baron von Rosenberg était un naturaliste particulièrement intéressé par les oiseaux.
C'est surtout l'ouvrage d'
Elio Modigliani parti d'Avril à Septembre 1886, riche en cartes et en illustrations, qui fera connaître l'île au grand public. Son expédition à Nias fait suite à une demande du musée d'anthropologie de Florence pour des collectes d'échantillons de flore et de faune ainsi que des artefacts; mais aussi de crânes pour les recherches en cours de
Cesare Lumbroso.
Il faudra attendre les années 1910 pour que l'anthropologue néerlandais
Johannes Pieter Kleiweg de Zwaan vienne à Nias pour y réaliser des études sur les habitants (les méthodes de l’anthropométrie et de la craniométrie sont en vogue à l'époque) qu'il a complétées par la réalisation de nombreux
moulages en plâtre des visages (Rijksmuseum d’Amsterdam).
Son ouvrage en néerlandais :
Die insel Nias bei Sumatra : Untersuchungen est
téléchargeable.
Ou peut toutefois trouver un long article en français "L'île de Nias et ses habitants" dans La Revu anthropologique, vol.40, 1930. P.116 et suiv.
Consultable sur Gallica.
En 1891, le Néerlandais
Christiaan Benjamin Nieuwenhuis ouvrit son premier studio photographique à Padang sur l’île de Sumatra. En plus des portraits des habitants de la ville, il a pris des photos des paysages, de l’infrastructure coloniale et des différents peuples qui vivaient à Sumatra. Ses photographies de Nias, des îles Mentawei, des Batak, d’Aceh étaient déjà très recherchées à l'époque. Il nous laisse donc une belle documentation dont beaucoup de photographies conservées au TropenMuseum, à Leyde et à Rotterdam. Ses photographies bien connues d'habitants de Nias en tenue d’apparat ont été prises dans le studio de Padang.
Puis, E. E. W. Schröder, administrateur colonial entre 1904-1909, écrit
Nias. Ethnographische, geographische en historische aanteekeningen en studien qui deviendra l'ouvrage de référence de ce début de 20è siècle. Le premier volume contient des écrits sur Nias et le second est une mine de photographies
téléchargeable.
De nombreux écrits sur Nias vont être réalisés par des colons néerlandais et des missionnaires allemands au cours des 19e et 20e siècles. Ils constituent encore aujourd'hui une importante source de référence.
Parmi ces derniers, citons Eduard Fries qui a oeuvré à partir de 1903 à la Société missionnaire de la Rhénanie sur Nias.
Il y a réalisé un important travail notamment dans le domaine linguistique et celui de la santé. À travers de nombreuses aquarelles et dessins, il a documenté les paysages, la vie quotidienne et les coutumes des habitants et a constitué une petite collection ethnographique. Ces témoignages ont fait l'objet d'une
exposition à Herrnut en 2006. On retrouve ces éléments dans l'ouvrage
Im 'Land der Menchen', Der Missionar und Maler Eduard Fries und die Insel Nias de Martin Humburg, Dominik Bonatz et Claus Veltman (2003).
Un peu plus tard, F.M. Schnitger, conservateur du musée de Palembang fut le chef d'expéditions archéologiques et anthropologiques à Sumatra en 1935, 1936 et 1938. Dans une perspective plus large et une étude érudite, il traite de Nias dans son ouvrage :
Forgotten Kingdoms in Sumatra paru en 1939 et
téléchargeable.
On trouve également un article en français : Les monuments mégalithiques de Nias dans
La Revue des arts asiatiques, 1939-1942, Vol. 13, No. 2, P. 78-84. Un intéressant article
téléchargeable.
À suivre...
Photo 1 : Fête à Nias, dépeçage des cochons, date ?, photographe inconnu, © Tropenmuseum TM10003381
Photo 2 : Gadawu, chef du villa de Tabeloho, Nias Nord, photo © Elio Modigliani.
Photo 3 : Couverture édition des 1890 d'Un viaggio a Nias
Photo 4 : Couple de mariés à Nias in de Zwaan.
Photo 5 : Le rajah en costume d'apparat, 1918, photo de C. B. Nieuwenhuis © TropenMuseum TM-60042492
Photo 6 : Vue de Bawömataluwö, photo © E.E.W. Schröder.
Photo 7 : Hoeroena, Maison de Nitano LOwalangi © Eduard Fries 1904
Photo 8 : Site d'Olayama, photo © F.M.Schnitger 1938